Quatorze ans plus tôt
   « […]c’est certifié, le maire et ses collaborateurs ont mis en place une nouvelle ligne de ferries. […] La nouvelle ligne devrait permettre de rejoindre le Groenland et le nom de l’Ecosse, l’accord ayant été signé, les travaux ont début cette semaine […].. » Une page de journal calcinée, c’était tout ce qu’il restait du hangar, tout le reste n’était plus que cendre et fumée. Tout un avenir commercial ruiné par l’égoïsme d’un homme, d’un criminel.
   Quand la fumée avait commencé à s’élever, la nuit précédente, personne n’y avait vraiment prêté attention, persuadé qu’il s’agissait encore d’un jeu stupide, inventé par les garnements du coin. Mais le nuage gris s’était épaissis et il avait bien fallu faire face à l’horreur; on brûlait quelque chose.. Quelque chose d’imposant. Les premiers a courir sur les lieux étaient les pêcheurs, parce qu’ils trainaient encore sur les quais à cette heure tardive, à vider le fond d’une bouteille payée de la vente du poisson de la pêche matinale. Et, par réflexe, ils avaient été les premiers soupçonnés; quoi de mieux comme suspects qu’une bande d’ivrognes récalcitrants face au projet. Malheureusement les preuves se faisaient maigres, pour ne pas dire inexistantes, puisque tout avait disparu avec l’incendie.
    Furieux de la nouvelle, le maire avait demandé à ce que des têtes tombent pour ce préjudice, mais personne ne se dénonçait ou n’osait réellement donner le nom du coupable à voix haute. Gustav Josefson. C’était lui. Ça devait forcément être lui, alors c’était devenu une rumeur persistante et la victime de ces ragots n’avaient pas eu à coeur de les démentir, appréciant sans doute le regain d’intérêt pour sa personne.
   
    Et puis c’était tombé une semaine plus tard, alors qu’on essayait encore de nettoyer la crasse provoquait par l’incendie; l’accord était rompu. Le Royaume-Uni se retirait du contrat et l’idée de ce nouveau port, de ce nouveau trajet d’un ferry plus performant.. Tout ce travail acharné du maire prenait fin et sa réputation avec.

Deux ans plus tôt
  Les invitations avaient été distribué, encore une fois, de manière bien particulière. Les téléphones des « élus » avaient été hacké, les écrans des dix membres invités affichant un même mot; « Flókatóftir ». Ils ne se connaissaient pas forcément, du moins pas tous, alors par soucis de sécurité, aucun n’avait osé dévoiler aux autres qu’ils avaient été choisi pour participer à un de ces événements si réputé auprès de la jeunesse locale.
    Une fois le message reçu, les invités devaient envoyer leur réponse, affirmative ou négative - quoique jusqu’ici personne n’avait eu l’audace de refuser - en répondant à un numéro qui ne s’affichait que pendant dix minutes et qu’ils devaient retenir. « Djöfullinn », de son surnom, savait attiser la curiosité et exciter les troupes.
     Ces derniers temps la rumeur, qu’une fête se préparait, n’avait cessé d’alimenter les conversations des lycéens et des jeunes adultes, ceux ayant atteint la limite de vingt-huitième n’étant plus listé comme invité potentiel de ces sauteries. Beaucoup avait déjà tenté d’y participer, sans y avoir été invité, mais tomber sur le soir où on organisait la soirée, sachant que les dates tombaient de manière aléatoire, relevait du hasard le plus total et pas de la chance.. Parce que la sécurité proposait par Djöfullinn garantissait l’anonymat des participants, mais aussi le secret du véritable lieu de l’événement. Si les rendez-vous avaient souvent lieux aux ruines, il se pouvait très bien qu’on déplace les fêtards vers un autre lieu que celui de base. Le secret. C’était la ligne conductrice de cet individu inconnu.

  Djöfullinn. Ce pseudo avait commencé à se répandre au sein de la jeunesse, comme une traînée de poudre. On pariait sur l’identité de la personne se cachant derrière, on cherchait à le rencontrer, sans jamais le voir. Il participait à ses fêtes, c’était sûr, seulement il parvenait à garder son anonymat en se fondant dans la masse, surveillant d’un oeil scrutateur les visages de ses « fidèles ».

Récemment
   Et jusqu’ici il s’agissait de boire, de danser, de fumer, de s’offrir à l’autre en toute conscience, jusqu’à ce que les groupes d’invités se réduisent progressivement. Que les fêtes deviennent plus intime et que le couperet tombe; Pour rencontrer Djöfullinn, en personne, il fallait se rendre à la réunion du 14 février où ils auraient à faire un choix. « Faire un sacrifice de sang, ou passer son chemin. » Quelques uns des invités passèrent leur chemin, mais certains, très curieux ou cherchant juste un guide, décidèrent de prendre ça très au sérieux… Trop au sérieux, sans doute.